Dreyfus, Carthago, de Castelnau et le sens des priorités
BFM TV est fier d’annoncer que Gabriel Attal a déposé une proposition de loi pour élever Alfred Dreyfus au grade de général de brigade. Bien sûr, à titre posthume. Une amie commente sur X qu’elle a vérifié, que la date de l’information n’est pas le 1ᵉʳ avril, mais bien le 6 mai.
Il n’est pas question ici de nier que le capitaine Alfred Dreyfus ait été jadis la victime d’un complot judiciaire et qu’il ait payé très cher – cinq ans de déportation sur l’île du Diable – une trahison commise par d’autres. Que sa réhabilitation, une fois son innocence établie, n’ait pas été assez généreuse est vraisemblable. Mais combien d’autres officiers ont vu leur avancement bridé par une IIIᵉ République sectaire, injuste, perverse ? Souvenons-nous de l’affaire des fiches où la franc-maçonnerie a servi de service de renseignement occulte à un ministère de la Guerre idéologisé pour stigmatiser d’un Carthago les officiers qui allaient à la messe, et ainsi pénaliser leur avancement. Encore un coup de la gauche hypocrite qui glose sur la méritocratie républicaine. Gabriel Attal ne serait-il pas plus crédible s’il demandait d’élever à un grade plus conforme à leurs réels mérites tous ces officiers catholiques ? Ne sont-ils pas eux aussi les victimes d’une injustice ? Bien sûr, il faudrait alors confesser que les loges n’ont aucune morale, que l’état est un monstre injuste, hypocrite et que les catholiques sont les boucs émissaires ordinaires des turpitudes d’une caste au pouvoir. Autre injustice notoire, le général Édouard de Castelnau, dit le capucin botté, sans doute le plus méritant de tous, qui n’est pas élevé au rang de maréchal de France après la guerre, parce que catholique fervent. Voilà une nomination, certes à titre posthume, qui récompenserait un vrai mérite, et non pas le fait – certes déplorable – d’avoir été une victime. Bref, la haine de la catholicité est durablement inscrite dans l’ADN d’une république partisane et haïssable.
Quelques réflexions.
Les victimes ont droit à la reconnaissance, à la compassion et à la compensation. Il est normal de les honorer, puisque nous n’avons pas réussi à les protéger, à empêcher qu’elles deviennent victimes. Mais il est indécent d’honorer autant ou plus des victimes que des méritants. Ainsi, la création d’une médaille nationale de reconnaissance aux victimes du terrorisme est une absurdité dont notre pays raffole en ces temps où le pathos anihile la raison. Et puis, la République hypocrite sait choisir les victimes qu’elle choye et celles qu’elle néglige : les parties civiles de tous les procès sont-elles satisfaites des indemnisations reçues ?
Relever une commune judaïté entre Alfred Dreyfus et Gabriel Attal sera considéré comme antisémite par la police de la pensée, donc je m’en garderai bien.
Mais surtout, en ces temps de coup d’État permanent où le Président s’engage dans une guerre sans même consulter le Parlement, où il grève le déficit comme s’il était le chef de ce gouvernement, où il envisage même de brader le dernier lambeau de souveraineté qui nous reste avec le contrôle du feu nucléaire, où un gouvernement maquille les comptes pour limiter la casse lors d’une élection (liste non exhaustive), un citoyen lambda pourrait penser que le Parlement a mieux à faire que d’attribuer des étoiles au lieutenant-colonel Alfred Dreyfus. Comme par exemple contrôler l’exécutif, et même le censurer pour ce qui concerne le gouvernement, et aussi destituer le Président. Je sais, je suis un doux rêveur.
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