Condamnation de Marine Le Pen : histoire du délit d’une « arroseuse arrosée »...
Lundi 31 Mars 2025, Marine Le Pen et vingt-trois autres personnes, ainsi que son parti le RN, ont été condamnés pour détournement de fonds publics. La justice les a reconnu coupables d’avoir embauché et payé des assistants parlementaires pour ses Eurodéputé(e)s, alors qu’en réalité, ils n’ont pas travaillé pour eux, mais pour leur parti le RN. Sanction critiquée des uns, mais conforme à la loi.

A propos de la condamnation de Marine Le Pen
Marine Le Pen, actuelle présidente du groupe RN à l’Assemblée a été condamnée à une peine de quatre ans d’emprisonnement, dont deux ferme aménageables sous bracelet électronique, à 100 000 euros d’amende, ainsi qu’à une peine d’inéligibilité de cinq ans avec application immédiate. Toutefois, si elle ne pourra pas continuer à exercer son mandat au Conseil départemental, elle reste députée de la onzième circonscription de Pas de Calais, mais elle ne peut pas se présenter devant le suffrage universel pendant les 5 prochaines années. En cas de dissolution de l’Assemblée nationale, elle ne peut donc pas candidater pour redevenir parlementaire. Elle ne peut pas non plus se présenter à la présidentielle de 2027 ( mais elle conserve la possibilité de demander la suspension de l’exécution provisoire au premier président de la Cour d’appel).
Dans l’énoncé du jugement, le tribunal a mis en avant le « rôle central » de Mme Le Pen, députée européenne de 2004 à 2017, dans le système mis en place pour détourner l’argent du Parlement européen. En 2024, selon la revue » Toute L’Europe » le montant du préjudice était estimé : au moins 6,8 millions d'euros. http://www.touteleurope.eu/institutions/soupcons-de-detournement-de-fonds-europeens-marine-le-pen-et-le-rn-seront-juges-a-partir-de-septembre/ Pour ses proches, comme pour les chefs d’Etats Européens de l’internationale d’extrême droite qui oublient les fait, c’est une « exécution » par la la justice
Au lendemain du réquisitoire du parquet en novembre 2024, la présidente des députés RN avait accusé les juges de vouloir « une peine de mort politique « . Après l’énoncé de son jugement du tribunal de Paris, ce sont les proches de Marine Le Pen qui sont montés au créneau pour la défendre en accusant la justice de tous les maux, ignorant les faits qui font l’objet de cette condamnation. Certains, comme Eric Ciotti n’hésitant pas à s’inspirer de la déclaration de chefs de gouvernements de l’internationale d’extrême droite, qui à l’instar de Wladimir Poutine, dont il fut le premier a déplorer lundi 31 Mars une « violation des normes démocratiques » en France, ce qui ne peut surprendre personne venant de la part de cet autocrate Russe qui abreuve quotidiennement l’Ukraine de ses missiles, qui sèment morts et destructions ! Mais on a les amis que l’on mérite. Il est d’ailleurs suivi par les chefs de l’extrême droite européenne qui ont réagi dans la foulée pour dénoncer le jugement.
Le populiste Premier ministre hongrois, Viktor Orban, s’est même fendu d’un message sur le réseau social X par une scandaleuse comparaison. Au pouvoir à Budapest depuis 2010 lui qui a mis au pas la justice et le secteur des médias, il a choisi la provocation avec un court « Je suis Marine », une référence au « Je suis Charlie » utilisé pour dénoncer les attentat au siège du hebdomadaire satyrique Charlie Hebdo du 7 janvier 2015 où cette attaque terroriste avait fait sept morts. Avec de tels amis en exemple politique, on peut imaginer ce que serait l’Etat de droit en France avec le RN...
Par contre, aucun d’entre eux n’a réagi au fait que le Rassemblement national ait détourné plusieurs millions d’euros d’argent public. Ce détournement de fonds publics a été commis au motif d’avoir embauché des personnels pour le parti en les faisant rémunérer par le parlement Européen, en qualité de prétendu(e)s assistant(e)s parlementaires, alors qu’ils n’avaient aucune activité au Parlement européen.
Ses soutiens actuels oublient aussi que Marine Le Pen avait des mots très durs contre les élus dans la même situation qu’elle aujourd’hui et exigeait leur inéligibilité à vie
Comme l’ont rappeler certains médias C’était en 2013, alors que François Hollande était président de la république Marine Le Pen ne déclarait-elle pas : « Moi j'ai entendu le président de la République dire que, ce serait de rendre inéligible à vie ceux qui étaient condamnés. Jusque là, j'étais parfaitement d'accord, c'est dans mon projet présidentiel. Mais lui parle seulement de corruption et de fraude fiscale. Ah bon, mais pourquoi pas le reste ? Mais alors pourquoi pas pour favoritisme, pourquoi pas pour détournement de fonds publics ? Pourquoi pas pour emplois fictifs ? », avançait-elle à l'époque, en pleine affaire Cahuzac. Pour mémoire, Jérôme Cahuzac avait été mis en cause par la justice pour avoir détenu un compte bancaire non déclaré en Suisse. Le socialiste avait pourtant fait de la lutte contre la fraude fiscale son cheval de bataille.
En avril 2013 sur la chaîne Public Sénat, soit presque 12 ans avant d'être condamnée à une peine de 5 ans d’inéligibilité dans le cadre du procès du Rassemblement national ce lundi 31 mars, Marine Le Pen avait encore des mots très durs contre les élus dans la même situation qu’elle aujourd’hui. Elle déclarait alors « Quand allons-nous tirer les leçons et effectivement mettre en place l'interdiction de l'inéligibilité à vie pour tous ceux qui ont été condamnés pour des faits commis grâce ou à l'occasion de leur mandat ? « , se demandait celle qui était alors députée européenne. http://www.publicsenat.fr/actualites/politique/video-quand-marine-le-pen-demandait-lineligibilite-a-vie-pour-les-elus-condamnes-pour-detournement-de-fonds-publics
En 2012, elle proposait dans son livre Pour que vive la France d'utiliser « l'arme de l'inéligibilité avec beaucoup plus de rigueur » tout en l'évoquant dans plusieurs discours de campagne. La mesure a cependant disparu de son programme en 2017 puis en 2022. Mais en En 2017, Marine Le Pen, déjà députée, s'était abstenue à trois reprises de voter en faveur de l'instauration d'une peine complémentaire d'inéligibilité en cas de condamnation pour atteinte à la probité dans le cadre de la loi pour la moralisation de la vie publique.
Quand en Novembre 2024 la proposition Jordan Bardella exigeait un casier judiciaire vierge pour les candidat(e)s RN
Alors que Marine Le Pen était déjà sous le coup du réquisitoire très sévère du parquet, Jordan Bardella avait lui même déclaré sur BFMTV, où il était invité à l’émission « Face à BFM » lundi 18 novembre 2024, qu’ il estimait qu’une personne condamnée en justice ne pouvait pas se présenter sous l’étiquette du RN.
En effet, à la question : « Est-ce qu’il faudra un casier vierge, désormais, pour être candidat du RN ? » Bardella s’est fendu d’une réponse étonnante à plusieurs titres : « C’est toujours la politique que nous avons suivie. A la différence près que quand les faits ont trente ans, certains ne figurent pas sur le casier judiciaire. Et donc il y a des gens qui, par duperie, dissimulent un passé qui n’a pas été affiché sur le casier judiciaire en question. Donc, ne pas avoir de condamnation à son casier judiciaire est pour moi une règle numéro un lorsqu’on souhaite être parlementaire de la République. »
Alors qu’ au moment de désigner les candidatures pour les dernières élections Européennes et nationale certains verdicts ne pas encore tombés, il y a des casiers judiciaires déjà remplis. Et c’est là le second point d’interrogation. Car à en croire Jordan Bardella que cette règle de ne pas investir un candidat condamné par le passé serait effective de longue date. Si tel était le cas, force est de constater de nombreux trous dans sa mémoire. Plusieurs contre-exemples existent, et pas des moindres.
Bruno Gollnisch 75 ans, Ex-conseiller municipal FN à Lyon et député européen pendant près de trois décennies, a été condamné à trois ans de prison, dont deux avec sursis et un an ferme sous bracelet électronique.
Catherine Griset, ancienne candidate aux législatives de 2012, députée européenne réélue en 2024, condamnation du tribunal correctionnel d’Annecy, en 2006, à 3 000 euros d’amende pour entrave à l’exercice des fonctions d’un inspecteur ou contrôleur du travail et exécution d’un travail dissimulé.
Wallerand de Saint-Just, conseiller régional d’Ile-de-France depuis 2015 et réélu en 2021, a été condamné par le tribunal correctionnel de Paris en octobre 2021 à 500 euros d’amende avec sursis pour diffamation. A cela s’ajoute une confirmation en appel en mars 2023 dans l’affaire dite des « kits de campagne », à six mois de prison avec sursis et une peine d’inéligibilité de deux ans pour recel d’abus de biens sociaux.
Sans oublier Louis Aliot, actuel maire de Perpignan, ancien député européen, qui avait été condamné par la cour d’appel de Versailles en janvier 2011 à 1 000 euros d’amende avec sursis pour complicité de diffamation. Marine Le Pen avait également écopé de 1 500 euros d’amende, à la même date, pour les mêmes faits. http://www.liberation.fr/checknews/le-rn-exige-t-il-vraiment-un-casier-judiciaire-vierge-pour-etre-candidat-comme-laffirme-bardella-20241119_ATBBPEH3URHN3MKR2BUV4SUPLA/
Selon certain(e)s, la démocratie Française serait minée de l’intérieur, notamment par la justice qui outrepasserait ses droits en prenant des décisions à caractère essentiellement politique.
Il est vrai que depuis lundi soir, avec la condamnation de Marine Le Pen potentielle présidentiable en 2027, on entend beaucoup d’affirmations et d’interrogations (dont celle du premier Ministre) plus ou moins rationnelles en oubliant que la France est un Etat de droit dans lequel il y a trois sorte de pouvoir, où pour assurer et garantir la liberté chacun doit être séparé l’un de l’autre et puisse ainsi s’équilibrer et se contrebalancer.
Ces trois sortes de pouvoir sont :
- Le pouvoir législatif
- Le Pouvoir exécutif
- Le pouvoir judiciaire
En France, le pouvoir judiciaire se subdivise en deux ordres juridiques distincts : d'une part l'ordre judiciaire (civil, commercial et pénal), chargé de trancher les litiges entre particuliers et les délits, d'autre part l'ordre administratif, compétent pour trancher les litiges opposant l'Administration et les particuliers. Pour éviter la confusion et inclure le juge administratif, l'on parle parfois en France de « pouvoir juridictionnel ».
Comme Montesquieu l’expliquait en 1748 dans l’esprit des lois « Tout serait perdu si le même homme, ou le même corps des principes, ou des nobles, ou du peuple, exerçaient ces trois pouvoirs : celui de faire des lois, celui d’exécuter les résolutions publiques, et celui de juger les crimes ou les différends des particuliers «
Si la séparation des pouvoirs passionne les révolutions de la fin XVIII ème siècle aux États-Unis et en France, et a inspiré notamment l’article 6 de la déclaration des droits de l’Homme et du citoyen « Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Autrement dit, cela ne peut être que par une constitution qui, telle celle de la France, assure une séparation des pouvoirs.
Dans L’esprit des lois, Montesquieu en fait une théorie générale qui permet de découvrir des principes applicables à toute constitution. Il part d’une conception pessimiste de la relation de l’homme au pouvoir : « c’est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser« .
Certain(e)s affirment que La justice Française outrepasse ses droits et fait de la politique. C’est totalement faux, la justice ne fait qu’appliquer les loi éditée par le pouvoir législatif
Dans notre démocratie, la justice est indépendante du pouvoir politique et ne fait qu’appliquer la loi éditée par le pouvoir législatif. Si toutefois il y a des ambiguïtés dans un texte de loi édité, son appréciation résultera de l’interprétation de façon contradictoire des magistrats et pourra donc faire éventuellement jurisprudence comme toutes décision de justice, c’est à dire qu’une décision de justice fait référence à des décisions précédemment rendue qui illustrent la manière dont un problème juridique a été résolu.
La condamnation imposée à Marine Le Pen pour le délit de détournement de fonds publics, vu les éléments du dossier et les faits reprochés, les magistrats n’ont fait qu’appliquer la loi éditée en 2016, votée par la grande majorité des député(e)s et pas remise en cause par la nouvelle majorité, car selon les sondages, la majorité de la population y est toujours très favorable à cette loi.
Pour mémoire cette loi fut votée par l’Assemblée nationale par 304 voix pour, 199 contre et 45 abstentions. La majorité de gauche avait voté pour, le Front de gauche (aujourd’hui LFI) et l’UDI s’étaient abstenus, tandis que LR avait voté contre. Le FN (actuel RN) était représenté au Palais Bourbon par deux députés : Marion Maréchal Le Pen (Vaucluse) avait voté contre, et Gilbert Collard (Gard) n’avait pas pris part au vote (le détail du scrutin à retrouver, ici). Marine Le Pen n’était pas députée. lors des Législatives de 2011, elle avait perdu de peu son duel face au candidat PS Philippe Kemel dans la 11e circonscription du Pas-de-Calais et n’avait pas pu obtenir de siège à l’Hémicycle de l’assemblée.
Marine Le Pen , comme elle en avait le droit, a fait appel de sa condamnation, ce qui suspend effectivement sa condamnation et dont la cour d’appel de Paris envisage un procès avec « une décision à l’été 2026 »
On n’a donc pas fini d’entendre parler de cette histoire ou le RN montre son vrai visage d’antan ressuscité par le Trumpisme qui draine la haine et la violence qui aujourd’hui, si elle n’est pas dirigée contre les Juifs, elle l’est contre les magistrats de façon ignoble et inadmissible, notamment lorsque certains sont menacés de mort et doivent être mis sous protection policière.
Alors que notre pays doit faire face à des problématiques complexes de l'urgence écologique avec la question démographique. Ce qui impose une décroissance la plus juste et équitable de celle-ci, si on veut intervenir un tant soit peu sur les dérives climatiques dues aux impacts de la loi du nombre et de ses effets. Au fond la condamnation de Marine Le Pen et sa procédure légitime d'appel, par son impact médiatique ne peut être que du pain béni pour le premier Ministre et son gouvernement qui , malgré certaines déclarations d'alerte sur le climat est peu sensible aux problématiques de l'urgence écologiste.
Pour conclure
Ses soutiens actuels oublient que Marine Le Pen avait des mots très durs contre les élus dans la même situation qu’elle aujourd’hui et exigeait leur inéligibilité à vie. Aujourd’hui, les proches de Marine Le Pen qui montent au créneau pour la défendre accusent la justice de tous les maux, ignorant les faits qui font l’objet de cette condamnation. Certains même, n’hésitant pas à s’inspirer de la déclaration de chefs de gouvernements de l’internationale d’extrême droite. Selon eux, la France glisserait vers la fin de la démocratie, car les décisions de justice concernant Madame Le Pen seraient politiques. Bref, la « tolérance zéro » et la répression doivent être implacables, sauf pour eux et leur clan. Et comme souvent, ils se moquent des faits et du réel.
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